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L’UX pour sauver la planète !

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L’UX pour sauver la planète !

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J’avoue que mon titre peut paraître un brin racoleur … 😊

Les UX Designers et les concepteurs d’interface ont-ils réellement un rôle à jouer dans la préservation de l’environnement et la lutte contre le réchauffement climatique ?

Le rôle des UX Designers

Pour Tom Greenwood, auteur de Sustainable Web Design, cela ne fait aucun doute. En une centaine de pages, il décrit toutes les manières et techniques possibles pour rendre plus “légers” nos sites webs et applications. Plus légers : c’est à dire moins gourmands en énergie. Moins gourmands en énergie signifiant, moins consommateurs de ressources et moins émetteurs de CO2. Objectif principal aujourd’hui de l’écologie.

Et il y a urgence ! Hier le GIEC, que tout le monde connait bien maintenant, publiait un énième rapport nous alertant sur l’urgence climatique.

Oui, donc, les UX designers ont bien un rôle à jouer dans cette affaire qui devrait tous nous préoccuper. Mais la véritable question selon moi est : jusqu’où doit-on aller, en tant que concepteur d’application numérique, dans l’optimisation écologique ?

Si l’on suivait à la lettre chaque recommandation de Tom Greenwood, il y aurait un très fort risque que tous les sites et applications se ressemblent et donnent une impression lancinante d’une immense monotonie. Mettant à bas toute la créativité graphique, la beauté du numérique, ses infinies possibilités. Et parfois, en occultant bien sûr, ses aspects marketings.

Ça y est, j’ai lâché le gros mot.

Environnement et marketing, pas compatibles ?

S’il semble évident bien sûr qu’il faille réduire le code inutile, alléger les médias, réduire le nombre de vidéos, et encore bien d’autres actions… certaines recommandations paraissent antinomiques avec les impératifs de la vente en ligne : utiliser des fonds noirs, qui utilisent moins d’énergie… Afficher des images basses résolution en noir et blanc ou en monochrome. Remplacer les vidéos par des animations. Ne pas se servir de fontes personnalisées.

Une frontière existe, fine, entre les impératifs de séduction commerciale et la préservation de l’environnement. Mais, avouons-le franchement, elle n’est pas facile à définir.

Quels choix faire quand on veut appliquer les principes de l’éco-conception, mais que l’on doit également répondre à des impératifs de vente… et donc de séduction ? Quand on connait l’importance d’une photo dans le choix de l’utilisateur, il semble à peu près hors de question de les publier en basse définition ou en trame de couleur.

La réponse à la question passe par la définition de l’UX : satisfaire un maximum les utilisateurs en leur fournissant des expériences claires, rapides, amusantes et efficientes. C’est le même mantra dont je parle depuis des années.

Alors… bon… là, vous allez me dire que cela revient à ne rien faire du tout…

Eh bien, non, en fait, car je crois que, la plupart du temps, comme des enfants gâtés, nous concevons des sites et des applications sans prêter la moindre attention à leur optimisation technique.

Optimisation technique

Il y a un vrai travail à réaliser en ce sens, dont je m’étais déjà fait l’écho dans un article sur l’optimisation de la performance des sites mobiles.

Réduire le code inutile, l’optimiser, devrait être une de vos obsessions principales. Mais qu’est-ce que cela veut dire, plus prosaïquement ?

  • supprimer les scripts redondants
  • supprimer les scripts qui sont téléchargés, mais ne servent à rien
  • compresser le code envoyé au navigateur (css et javascript)

D’autres choix peuvent être faits :

  • choisir un hébergeur proche de vos clients afin de réduire la distance entre vos données et leurs destinataires
  • utiliser de l’énergie peu émettrice de CO2. De ce point de vue là, nous avons de la chance en France… nous sommes dans un pays qui produit une des électricités les plus décarbonés du monde (avec le nucléaire, mais ne vous énervez pas)

Quelle est la limite de ces optimisations ? Il n’y en a pas. Ce qui est une bonne nouvelle. Vous pouvez y aller à fond. Ça ne fera qu’améliorer votre UX et baisser vos émissions de CO2.

Optimisation du design

Parallèlement à ce travail, il faut aussi s’intéresser fortement à la compression des images qui sont, quand on mesure le taux d’émission en CO2 d’un site, les plus grosses pourvoyeuses de carbone. À la vérité, les images sont même le problème principal. Ce sont les plus gourmandes en bande passant et celles qui font travailler le plus le processeur de nos machines (téléphones et ordinateurs). Lutter contre leur surpoids doit donc être un devoir, une mission presque sacrée 🙂

Jusqu’où les médias doivent être optimisés ?

C’est difficile de le dire. Une chose est certaine, il faut faire un véritable travail de recherche et déterminer où et quand la compression des images dégrade nettement ou pas leur qualité. Il existe de nombreux formats de compression qui s’améliorent avec le temps, et notamment des formats spécifiques au web comme le WEBP, 30% plus léger que le jpeg à qualité égale… ou encore le AVIF (encore peu répandu), 50% plus léger que le WEBP. Gageons que ces algorithmes se perfectionneront encore plus avec le temps.

Ce qui est intéressant dans ces actions d’optimisation, c’est qu’elles vont toutes non seulement dans le sens de la réduction d’émission de CO2, mais aussi de celui de l’amélioration de l’UX. Plus un site est léger, plus il est rapide à charger, meilleure et plus agréable sera la navigation. Ce de côté là, rien de nouveau, finalement, sous le soleil.

Mais si je reviens à mes moutons, et à ma fameuse frontière… je n’ai toujours pas défini où elle devait réellement se trouver.

Un indicateur intéressant

Je trouve qu’il existe un indicateur intéressant qui pourrait bien nous permettre d’y voir un peu plus clair à ce sujet. C’est un indicateur qu’utilise aussi Google, le maître de ce monde numérique. Avec les fameux Core Web Vitals, il a défini un certains nombres de paramètres censés mesurer la qualité de l’UX. Je ne discuterai pas de leur pertinence, mais me permettrais d’attirer votre attention qu’ils sont, pour certains, basés sur un postulat : au delà d’une seconde de chargement, l’utilisateur ressent de la lenteur. Et l’utilisateur, la lenteur, il n’aime pas ça. Il veut du fluide, du réactif, pas de la bave de limace visqueuse qui s’écoule laborieusement entre les doigts.

Ce “une seconde” provient de recherches scientifiques ancestrales, mais est bien attesté par de nombreux experts. Et l’on pourrait le traduire par : faites que toutes les pages de votre site s’affichent dans un délai inférieur à cette limite quelque soit le terminal et la vitesse de connexion de votre utilisateur.

Sortez de votre grotte de digital native

Ce qui fait qu’à ce stade, vous l’aurez compris, il va vous falloir sortir de votre grotte de digital native ou d’expert du numérique, de prendre votre vieux portable et d’aller faire un séjour au fin fond de la Corrèze. Là où la bande passante est aussi rare qu’une averse dans le désert.

C’est un drame, et je le répète depuis des années, nous, concepteurs d’interface, ne faisons pas assez attention au monde qui nous entoure, et surtout à ceux, qui, contrairement à nous, ne sont pas équipés de fibre optique à 300Mo/s, de 4 ou de 5g sans limitation de forfait, ou d’iPhone dernière génération. Dans la nature, partout, le monde de nos utilisateurs est varié et pourtant nous concevons des sites comme si chaque utilisateur était armé pour le numérique avec une fusée intergalactique.

C’est très loin d’être le cas, et il suffit souvent de regarder autour de soi (sa famille, par exemple) pour s’en rendre compte.

Là, se trouve une véritable source d’optimisation, mesurable, et positive pour la planète.

Concevons pour du mauvais matériel et de la mauvaise bande passante !

Vous allez me dire que j’exagère.

Pas tant que ça, au fond.

Je crois que se dire que si toutes les pages d’un site sur un iphone 4 en 3G se chargent en moins de 3 secondes, nous aurons réussi quelque chose de bien pour les gens et pour la planète sur laquelle ils vivent.

Tout en préservant le travail de conception et de design de notre site, si nous le passons à la moulinette de l’iphone 4 et de la 3G, nous pourrions bien être capables, nous designers, de bien remplir notre rôle de sauveur de la planète (la notre, pas Mars, pas encore, même si Elon Musk y travaille).

Il faut donc étendre notre domaine de réflexion. En 2021, nous savons très bien créer des sites attractifs, amusants, facile à utiliser, efficients, mais… nous ne savons pas encore bien… ou nous ne passons pas encore suffisamment de temps à réduire leur impact environnemental.

S’en préoccuper revient à faire un petit effort, conjoint, entre développeurs et designers, pour créer des interfaces non seulement plus légères, mais aussi plus inclusives. L’effort à accomplir ne semble pas si important que cela, et le surcoût de cet effort pourrait vite être absorbé par les bonnes habitudes obtenues.

Alors, est-ce qu’on va tous s’y mettre ? (à sauver cette bon dieu de planète) 🙂


Photo de l’article par Qingbao Meng


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