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Carnets de l’UX : Bienvenue à Dynamic Island !

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Carnets de l’UX : Bienvenue à Dynamic Island !

Ou comment un mot peut changer toute l’expérience d’une interface

Ce que je trouve génial dans Dynamic Island (le petit truc qui a fait le buzz lors de l’Apple Event et qu’Apple a fait monter en sauce, comme la nouvelle révolution), ça n’est pas le fait d’avoir caché un disgracieux morceau de hardware dans un petit morceau d’interface. Ni d’avoir inventé un bouton protéiforme multifonctions qui obéit au doigt et à l’œil comme un fidèle toutou dans la paume de votre main.

Non ce que je trouve génial, c’est de l’avoir appelé “Island”… Une île… Tout un monde, tout un rêve dans un mot.

Tout un monde dans un mot

Apple aurait pu l’appeler l’encoche dynamique ou bien le “central commander” ou bien encore n’importe quoi de technologique, mais non… C’est un nom bien plus chargé d’évocations qui a été choisi et je me demande si le point fort de l’affaire, ça n’est pas ce mot, justement : l’Île… Rien que de l’écrire, de le prononcer dans ma tête, fait surgir dans les circonvolutions de mon cerveau mille images, mille scènes de film, mille rêves, mille livres.

Une île est toujours la promesse d’émotions fortes

Parce qu’une île, qui est un lieu bien délimité, isolé dans un océan, fermé par une barrière d’eau immense, une Île est toujours un lieu déchaînant l’imagination, source, à la fois de promesses mirifiques, mais aussi de dangers absolus. L’île, c’est la boîte aux chocolats de Forrest Gump. On ne sait jamais ce qu’on va y trouver, mais on est toujours agréablement surpris.

Que l’on songe à Lost où un groupe de passagers d’un crash d’avion se retrouve confronté à de mystérieux phénomènes et des mystérieux habitants.

Ou à l’Île du Docteur Moreau où les explorateurs se retrouvent confrontés à la pire des créations.

L’île possède toujours une façade aguicheuse dans l’imaginaire. Souvent paradisiaque, souvent garnie de jungle, de plantes verdoyantes, de plages de sables blancs. L’île est toujours séduisante. Parce qu’on peut y échapper à la réalité du monde, parce qu’on peut y vivre en autarcie, parce qu’on peut s’y réinventer en se retrouvant soi même.

Ne demande-t-on pas souvent : “Si vous deviez emporte quelque chose avec vous sur une île, qu’est-ce que vous prendriez ?”

L’île nous ramène toujours à une dimension essentielle de notre existence.

Elle nous ramène à nous, comme Tom Hanks dans Seul au monde. Ou bien, forcément Robinson Crusoë. L’île nous transporte dans un rêve d’absolu dans lequel notre univers serait forgé par notre désir de tranquillité absolu, de vie idéale, parfaite, ramené à sa plus simple nudité et simplicité, pure… Elle reflète notre désir de vie idéale, débarrassée des autres.

Robinson Crusoe

Dans Dynamic Island, c’est la promesse de mettre le monde du numérique à nos pieds et de pouvoir le commander d’un simple geste du pouce ou de l’index.

De nous rendre tout puissant dans notre propre île, de faire de nous le maître de nos applications, d’être le roi ou la reine absolue de notre royaume (l’iPhone, porte d’entrée du monde numérique).

L’île n’est jamais un univers fade, gris ou plat… qu’elle dissimule le mal ou le bien dans ses entrailles, on n’y trouve jamais de petits trésors ou de petites horreurs…L’île est toujours l’écrin du maximum, de l’absolu, du plus merveilleux des merveilleux ou de la pire des horreurs (King Kong, l’Île au trésor). Ce qu’elle contient ne laisse jamais indifférent, étonne et surprend toujours, nous bouleverse, est comme un grand raz de marée dans l’existence des héros qui la découvrent. L’île est un lieu de transformation et métamorphose ceux qui y mettent le pied.

Voilà pourquoi le mot “île” est sans doute la meilleure trouvaille dans le Dynamic Island d’Apple.

Sans ce mot, il n’y aurait rien, ou du moins pas grand chose, et nous serions sans doute restés beaucoup plus indifférents à ce petit appendice numérique dans l’interface de l’iPhone.

C’est une grande leçon que nous donne Apple, car elle nous rappelle que le pouvoir des mots est sans doute encore plus puissant que le pouvoir des images, du design. Un mot peut tout changer. Un mot enferme en lui des milliers d’images. Chacun peut le parer de l’apparence qu’on veut bien lui donner. Il est à la fois universel et unique.

Et ce mot, “île” est sans doute l’un des plus forts qui soit, un des plus stimulateurs de notre machine à rêves, notre cerveau.

Alors bien sûr, en tant que designer, rare nous est donné l’occasion de donner un nom à un morceau d’interface… en revanche, il s’agit d’y penser, travailler son wording, réfléchir à son ton de voix, au vocabulaire utilisé, peut radicalement transformer l’expérience d’un site ou d’une app. C’est cela aussi que nous enseigne Apple : le design, ce ne sont pas que des formes, des couleurs et des animations… ce sont aussi des mots, des petits mots, qui ont le pouvoir imparable de déclencher des vagues de souvenirs, de réminiscences dans nos pensées, et rendent et transforment les expériences en de belles aventures.

Cela est tout aussi remarquable que d’avoir caché l’encoche dans un bouton virtuel.


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